La succession de Léon Kengo au perchoir du bureau du Sénat est lancée. Ultra majoritaire dans les deux chambres du parlement, le Front Commun pour le Congo (FCC) est assuré d’occuper la présidence du Sénat et l’Autorité morale, Joseph Kabila, a jeté son dévolu sur Alexis Thambwe Mwamba pour briguer ce poste. Pourtant cadre du FCC, Modeste Bahati ne l’entend pas de cette oreille et a annoncé dans la foulée sa candidature sous le label de son regroupement politique AFDC et Alliés. En attendant le dépôt effectif des candidatures, le débat commence à devenir orageux dans l’opinion entre les soutiens de ces deux désormais frères ennemis.
Dans les rues, sur les réseaux sociaux et dans les salons politiques de Kinshasa et de l’intérieur du pays, pro Thambwe et pro Bahati multiplient des déclarations pour faire valoir leurs candidats respectifs. Au regard de l’intérêt du public à ce sujet, Sondage Les Points s’y est aussi intéressé et a mené un sondage d’opinion là-dessus.
Une seule question a été soumise aux enquêtés, toutes tendances politiques confondues (FCC-CACH, opposition, Société Civile et le reste de la population sans tendance politique). Que pensent les congolais de ces deux candidats déclarés à la présidence du Sénat? C’est la question qui a été posée à 1000 personnes triées au hasard, représentant toutes les couches sociales de la population congolaise. On y apprend après recoupement des résultats, notamment, que 65% des congolais penchent du côté d’Alexis Thambwe Mwamba contre 30% pour Modeste Bahati et 5% d’abstention (sans opinion).
C’est le résultat de la première enquête sur l’élection des membres du bureau définitif du Sénat. Un sondage réalisé du jeudi 4 au samedi 6 juillet 2019. Cette enquête a été réalisée après l’annonce de la candidature de Thambwe Mwamba par le FCC et celle de Bahati Lukwebo par l’AFDC et Alliés. Selon ce sondage, si cette élection se déroulait au suffrage universel direct, le candidat du FCC battrait celui de l’AFDC et Alliés. Si ce scrutin ne semble pas être la préoccupation des congolais, plus intéressés par la publication du gouvernement dont l’attente se fait longue, la population a tout de même fait son choix.
Ils sont 60% des répondants à penser qu’il revient au FCC de départager ses deux membres avant le scrutin contre 40% qui jugent qu’il faut laisser les deux challengers s’affronter pour le plaisir de la démocratie congolaise.
Alexis Thambwe favori des pronostics
A l’hypothèse où les deux candidatures étaient maintenues, 65% de congolais souhaitent voir Thambwe Mwamba se faire élire. Ceux qui sont de cet avis mettent en avant, entre autres la rigueur de l’ancien ministre de la Justice, son intelligence, son expérience dans la gestion des structures publiques, le soutien du FCC dont il est bénéficiaire; sa probité morale, etc.
En effet, les personnes qui lui sont favorables estiment que du haut de ses 76 ans d’âge, il a sans doute l’expérience et la sagesse nécessaires pour diriger les débats au sein de la chambre des sages qu’est le Sénat. Non seulement il peut compter sur sa propre expérience qui n’est plus à démontrer, mais surtout il a le plein soutien de Joseph Kabila et de ses fidèles camardes du FCC.
Parlant justement de son expérience, les pro Thambwe soutiennent que cette figure respectée de la scène politique congolaise depuis l’époque de Mobutu est un homme de principe et un intellectuel au plein sens du terme. Formé au sein de l’Union des Démocrates Indépendants (UDI), cet originaire de la province du Maniema est connu comme un homme de conviction qui ne se laisse pas manipuler.
Licencié en Sciences politiques et en Droit, celui qui allie ces deux sciences dans sa vie de tous les jours est aussi détenteur d’une maîtrise en Droit sociologique du travail, ce qui lui a permis d’occuper plusieurs postes de hautes responsabilités. De la Société Nationale de Chemin de fer du Zaïre (SNCZ) dont il était Administrateur au Conseil des Instituts Supérieurs du Congo (ISP) en passant par la Banque Commerciale Zaïroise (BCZ, actuelle BCDC), l’Association Nationale des Entreprises du Zaïre (ANEZA, actuelle FEC) et la Société Minière et Industrielle du Kivu (SOMINKI), la Compagnie Financière et Minière Belge (COFIMINES) ou encore la Compagnie Belge de Gestion Minière (COGEMIN), il a travaillé dans plusieurs entreprises publiques et maitrise parfaitement la gestion des ressources humaines.
En tout cas, pour ceux qui lui sont favorables, l’ancien Ambassadeur de la RDC en Italie et ancien ministre des Travaux Publics, Portefeuille, Transports et Communication, Plan, Affaire étrangères et Justice sait aussi ce qu’il veut. A ce propos, il faut noter que le candidat du FCC compte conforter le rôle du sénat, notamment en faisant asseoir le contrôle de l’action gouvernementale en étroite collaboration avec l’Assemblée nationale. Aussi, il envisage le plus sérieusement du monde de moderniser et de rénover les services de la chambre haute du parlement par l’informatisation du système de gestion administrative et financière, mais également par l’amélioration des conditions de travail et de vie des sénateurs et du personnel administratif. Autant d’éléments qui convainquent 65% des congolais qu’il est le candidat idéal.
Bahati jugé peu crédible
Les 30% des répondants qui sont favorables à Bahati Lukwebo mettent eux aussi en avant l’expérience et l’intelligence de leur champion. Eux aussi se vantent du fait que le leader de l’AFDC est, selon leur dire, l’unique cadre du FCC à avoir pris le courage de prendre le contrepied de l’autorité morale et en plus sur une question aussi importante.
Seulement, même dans le chef de ceux qui le soutiennent, Bahati Lukwebo peine à convaincre du fait que l’opinion se souvient de ses plaintes à répétition pour la marginalisation supposée dont il fait l’objet au sein de la famille politique de Joseph Kabila sans prendre en mains ses responsabilités pour quitter le navire.
Ainsi, environ 70% des répondants, qu’ils lui soient favorables ou non, jugent que l’ancien Ministre de l’économie n’est pas clair sur ses ambitions et qu’il serait plutôt en quête d’un poste juteux dans le prochain gouvernement pour se calmer. Les 5% des congolais qui n’ont pas d’opinion ou qui ont refusé de donner leur avis justifient leur scepticisme par le fait que pour eux, le FCC voudrait distraire l’opinion en vue de détourner son attention des vrais défis dont doivent s’occuper les institutions du pays, en commençant par le Président de la République.
Avec Les Points